Héloïse et Abélard

Mausolée d'Héloïse et Abelard au Père Lachaise
Alexandre Lenoir 1817
Héloïse et Abélard
Pierre Abélard, natif d’une bourgade Bretonne nommée Le Palais, possédait un incontestable génie pour les disciplines littéraires.

Riche d’un enseignement philosophique poussé, il aimait exercer l’art de la controverse s’armant des raisonnements de la dialectique pour devenir un messager ambulant, parcourant les provinces où cette étude était à l’honneur.

Arrivé à Paris il devient clerc et chanoine, régent des écoles de la capitale, régnant sur les élèves de l’île de la cité.
Ce très célèbre professeur de théologie et philosophie possédait une renommé universelle qui attirait une foule d’étudiants venant suivre ses enseignements.


Héloïse était une adolescente orpheline prise en charge par le frère de sa mère : Fulbert, un chanoine de Notre Dame.
Ce dernier aimait beaucoup sa nièce et fit tout ce qui était en son pouvoir afin de l’instruire dans la science des lettres, une discipline pour laquelle elle se montra fort douée (une qualité rare chez les femmes de cette époque).

Héloïse avait 16 ans et Abélard 38 ans lorsque leurs destins se croisèrent. Abélard jouissait d’un renom extraordinaire et Héloïse fut naturellement fascinée par ce célèbre personnage.

Il s’enflamma d’amour pour cette adolescente érudite, et ne tarda pas à agir auprès de l’oncle Fulbert afin d’être accueilli en pension sous son toit prétextant instruire sa nièce à domicile et être proche de l’école.
L’oncle accepte et presse Abélard de réserver à sa nièce ses enseignements et de la réprimer sévèrement si besoin.

Quai aux Fleurs - Paris IVe
Avec le prétexte d’étudier, les livres sont bien ouverts, mais les mains se ramènent plus souvent vers les endroits intimes que vers les ouvrages, l’amour se réfléchit dans leurs yeux plus souvent que la leçon…

Plusieurs mois se sont écoulés lorsque l’oncle finit par découvrir cette relation cachée qui le couvrit de honte et de déshonneur. Il chassa Abélard de sa maison, mais cela ne fit qu’attiser la passion entre les deux amants épris l’un de l’autre.

La découverte de la grossesse d’Héloïse les fit fuir en Bretagne sur la terre natale d’Abélard, dont la sœur de ce dernier les accueillit avec une grande affection.
Héloïse mit au monde un fils qu’elle appela Astrolabe et qu’elle confiât à ladite sœur d’Abélard.

De retour seul à Paris Abélard tente d’apaiser la fureur de l’oncle auprès duquel il souhaite réparer ses torts.
Il convient donc d’épouser Héloïse dans le secret : afin que sa propre gloire ne soit pas entachée, dans le dessein de continuer ses activités de clerc incompatibles avec le statut d’époux.
La paix fut scellée entre les deux hommes, mais cette rancœur que cultive Fulbert ne le lâchera jamais…

Héloïse et Abélard s’uniront au petit matin dans la plus grande discrétion. On suppose que ce mariage ait pu avoir lieu en la Chapelle Saint Aignan dont les vestiges subsistent encore 19 rue des Ursins. (Cette chapelle est une propriété privée qui malheureusement ne se visite pas)

Fulbert ayant repris Héloïse (seule) sous son toit, il ne tarda pas à divulguer ce mariage arrangé afin de décrédibiliser Abélard puis il entreprit de maltraiter sa nièce qui ne cessa de démentir ses épousailles.
Abélard força alors Héloïse à se cacher comme visiteuse laïque au couvent d’Argenteuil où autrefois elle fut instruite. Fulbert profita de cette occasion pour prétendre à une répudiation de sa nièce unie devant Dieu et les hommes à Abélard.

Il avait enfin trouvé prétexte à assouvir sa vengeance de la manière la plus violente qu’il soit…

Une nuit où Abélard dormait dans une chambre retirée de son logis, son propre serviteur étant corrompu par Fulbert, des sbires entreprirent de le punir par le châtiment le plus cruel : amputer les parties de son corps avec lesquelles il avait péché. (Il fut tout bonnement châtré à vif). Deux d’entre eux furent arrêtés, eurent les yeux crevés et furent amputés de leurs organes génitaux (dont le serviteur d’Abélard). Quant à Fulbert, il fut dépossédé de tous ses biens et jeté en prison.

Héloïse prit le voile dans le monastère d’Argenteuil sans véritable vocation mais pour s’offrir en sacrifice à la gloire de son amour dont elle s’accusait avoir causé la déchéance. À son tour, à peine remis de ses blessures, Abélard revêtit l’habit monastique en l’abbaye de Saint Denis. Dix années s’écoulèrent sans aucun échange entre les époux…

Abélard se consacra alors à œuvrer uniquement pour l’amour de Dieu, dirigeant son étude essentiellement vers la théologie. De ce fait, il excite l’immense jalousie et la haine des maîtres envers lui. Ses collègues réunirent un concile contre lui et son livre sur la Trinité sera brûlé en public…

On lui concéda la permission de se retirer en solitude à la condition de ne se placer sous la juridiction d’aucune abbaye. Il fondera (avec l’assentiment de l’évêque) dans un village près de Troyes, un premier oratoire au nom de la Sainte Trinité qui deviendra l’abbaye du Paraclet.

Lorsque les moniales furent chassées d‘Argenteuil, (suite à la faute d’une d’entre elles, qui séduite par un visiteur avait eu un enfant), Abélard leur offrit son accueil au sein du paraclet où il invita Héloïse à s’y rendre accompagnée des meilleures de ses consoeurs.
Demeurant au monastère de Saint Gildas, Abélard visitait alors le Paraclet plusieurs fois par ans et entretenait une correspondance exaltée mais pieuse avec celle qui fut son épouse.
Il assouplit les règles monastiques à la demande d’Héloïse, lui écrivit un commentaire complet sur la genèse (l’Hexameron) et composa 133 hymnes pour améliorer la liturgie des moniales.

Abélard Décéda à l’âge de 63 ans et sa dépouille fut transporté au Paraclet, tel qu’il l’avait souhaité. Héloïse le rejoignit 22 ans plus tard au même âge dans un tombeau commun.

Les reliques des deux époux séjournèrent 650 ans au Paraclet, puis 8 ans à l'église de Nogent-sur-Seine, ensuite 17 ans au couvent des Petits Augustins (Paris VI) pour finir au cimetière du Père-Lachaise (Paris XX), dans un mausolée conçu par Alexandre Lenoir qui est toujours visible à ce jour.

Mausolée d'Héloïse et Abélard - Père Lachaise Paris XXe


Je terminerai cette histoire sur cette citation d’Abélard : « Voulez vous aimer Dieu, nous dit-il : ne l’aimez pas comme j’aimais Héloïse, mais comme Héloïse m’a aimé ».

Héloïse (1101-1164) et Abélard (1079-1142)

Abélard Facade du Louvres - Paris Ier


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